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Atelier 1: Lien social et mobilités géographiques

(F. Brumont)

Publié le 15 novembre 2007 Mis à jour le 12 décembre 2007

Enseignants-chercheurs permanents : F. Brumont, O. Caporossi, B. Doumerc, J. Thomas.

Problématique et projets de l'atelier
Les sociétés anciennes sont volontiers décrites comme des sociétés immobiles, des sociétés de sédentaires, animées toutefois de mouvements à courte distance, dans un espace confiné et bien connu d'eux, « mouvement brownien » pour Marc Bloch, sociétés de « sédentaires-voyageurs » « de voyageurs sans voyages » pour reprendre les expressions utilisées par Madeleine Foisil à propos du sire de Gouberville. Pour notre part, nous assimilerions plutôt les mobilités géographiques aux trois temps braudéliens : la mobilité du quotidien, celle qui mène le paysan aux champs, à la messe, au marché, à la foire ou chez ses parents et voisins, mobilité que seuls des documents exceptionnels, comme les livres de raison, peuvent nous faire approcher ; le voyage à moyen terme, celui qui est lié aux « jeux de l'échange », au sens large du terme qui concerne aussi bien les marchands, les muletiers que les étudiants ou les bandits de grands chemins, enfin, les voyages au très long cours, liés à la mondialisation de l'espace qui expédie marins, marchands, administrateurs soldats, aventuriers et explorateurs sur toutes les mers du monde qui s'ouvrent peu à peu aux navigateurs dès la fin du Moyen Âge.
Nous nous intéresserons plus particulièrement au deuxième type de mobilité, essentiellement terrestre, qui concerne certainement un grand nombre d'individus, des hommes pour la plupart, appartenant à toutes les couches sociales. Certains d'entre eux font l'objet de travaux de la part des membres de l'équipe. Outre les marchands, dont nous parlerons plus en détail plus bas, citons les étudiants et leurs maîtres (Patrick Ferté), les officiers de justice (Jack Thomas) ou les officiers tout court, comme ces soldats flamands qui s'engagent en masse dans les armées espagnoles (Thomas Glesener). D'autres ont des motifs moins avouables mais tout aussi compréhensibles de se déplacer, et parfois rapidement, ce sont les malfaiteurs qu'étudie Olivier Caporossi, des faux-monnayeurs dans ce cas, qui ont de bonnes raisons de circuler, voire de franchir les frontières si le besoin s'en fait sentir. Loin de ces marginaux, signalons une catégorie professionnelle, inscrite par définition dans la mobilité, les consuls, étudiés par Bernard Doumerc.

Après avoir mis en chantier deux rencontres ayant abouti à deux publications portant sur la circulation des marchandises et les réseaux marchands terrestres, les conclusions du colloque d'Andorre permettent d'avancer que ce dernier thème mérite une plus grande attention. En effet, il nous semble intéressant de mettre en lumière les acteurs même de la circulation des produits, éclairer les relations qu'ils entretiennent entre eux et le rôle qu'ils jouent. La personne du marchand est à la base de la circulation physique des marchandises, mais elle peut transmettre aussi des informations sur les besoins, voire les goûts, susciter ou répercuter les modes, et donc influencer les producteurs. C'est ce que montrent, par exemple, les travaux de Francis Brumont sur les relations entre les marchands navarrais et béarnais et les producteurs de toiles normands et lavallois, relations qui se nouent par de contacts personnels lors des foires du Poitou, qui se tiennent à intervalles réguliers à Niort et à Fontenay-le-Comte. Le marchand serait ainsi la figure centrale, le personnage clé, par son rôle d'intermédiaire, par l'interaction qu'il créerait entre l'amont (la production) et l'aval (la consommation).
Nous touchons là les acteurs directs de la circulation, les donneurs d'ordres autant, en définitive, que la pléiade des facteurs, muletiers, colporteurs, transporteurs en tout genre, autres acteurs essentiels du commerce, mais figures qui restent encore à découvrir. La connaissance des marchands bute, tout d'abord, sur un problème de sources, en grande partie résolu lorsqu'on dispose d'archives privées. Dans la plupart des cas, l'archive notariale, au prix d'un long dépouillement, devient une ressource inestimable, nécessaire à une micro-analyse et à une approche prosopographique. En ce sens, il serait intéressant que des études de cas permettent de se confronter aux acquis récents de l'historiographie concernant les réseaux marchands, par exemple ceux présentés en 2003 par Anthony Molho et Diogo Ramada Curto dans un numéro des Annales. Histoire, sciences sociales.
Les trois mots du sous-titre (« organisation, hiérarchie, mobilité ») annoncent les trois axes autour desquels nous voudrions creuser le thème des acteurs du commerce, quoiqu'il y ait une réelle imbrication, dans la réalité, entre ces trois termes.
Ce projet s'inscrit dans la continuité de la collaboration entre les chercheurs, de part et d'autres des Pyrénées, engagés dans une démarche de recherche similaire et prêts à s'engager au sein d'un projet collectif. Ce dernier pourrait être structuré au cours de l'année 2006 et donner lieu à des séminaires méthodologiques au cours des années 2007 et 2008, tant dans les universités espagnoles que dans leurs homologues françaises. La synthèse des recherches donnera lieu à un colloque à l'automne 2009. Remarquons, pour terminer, et les thèmes proposés pour ce futur colloque le montrent bien, que la mobilité géographique est bien souvent liée à la mobilité sociale et que les espoirs d'ascension motivent bien des déplacements ; il n'est donc pas possible de dissocier ces recherches des autres thèmes envisagés dans le reste de l'équipe « lien social »

Voir la présentation générale de l'équipe 5